Episode 15 : Oasis Paumé Springs
Des voix lointaines se faisaient entendre, une conversation ressemblant fortement à une violente dispute.
- Qu'est-ce qu'il fout là le merdeux ?!
- Va-t'en Tyler, rentre à la maison, tout de suite.
- Attends attends ! cria le garçon aux cheveux de feu, on peut s'arranger !
- Helias..
- Ferme les yeux, Tyler !
- Nan arrête ! supplia cheveux de feu en tentant de se protéger, pitié !
Les deux garçons face aux Valdenn laissèrent échapper des hurlements, de violents coups suivirent à en frissonner d'effroi.
Tyler se réveilla en sursaut et en transpiration, le coeur battant la chamade, les doigts crispés sur ses draps.
Après quelques secondes, il se calma un peu et se rallongea, perdu dans ses souvenirs.
En quelques semaines, les couleurs de l'automne étaient apparues en même temps que le froid.
Je profitai d'un dimanche pour retourner chez moi, dans ma ville, en compagnie de mes bras cassés qui avaient des comptes à régler de leur côté.
Oasis Springs m'avait terriblement manqué, tous les endroits que j'avais fréquentés toute mon enfance, tous les habitants qui étaient devenus mes amis.
Mais ce n'était rien comparé à la maison où j'avais grandi, et mes parents, mes piliers.
Un pincement au coeur m'immobilisa quelques secondes.
C'était la première fois que j'étais séparée de mes parents autant de temps, et la séparation n'avait pas été sans larmes.
Quel bonheur de les retrouver, mes deux rayons de soleil.
- Ma chérie, soupira ma mère en me serrant fort dans ses bras, tu m'as manqué !
- Vous m'avez trop manqué aussi.
Ah.. Ma chambre, des souvenirs plein les murs, l'endroit où j'ai le plus ri et le plus pleuré. La pièce la plus rassurante au monde pour moi, c'était très touchant de la retrouver.
- C'est vrai ? s'enthousiasma ma mère, comment il s'appelle ?
- Adam, il est blond, il est mignon.. Et il cuisine divinement bien !
- On n'a jamais eu de chef dans la famille, ajouta mon père.
- Nan mais on n'en n'est pas encore là, papa.
Je leur racontai quelques histoires du campus, leur expliquant comment tout se passait et comme j'étais heureuse. Je n'allais tout de même pas leur énumérer tous les problèmes qu'on avait et qu'on allait rencontrer.
Je regardais mes parents, dans quelques heures j'allais les quitter encore, et cette pensée là me brisa le coeur.
Comment oublier l'endroit où je me faisais belle pour nos soirées et pour un beau brun ténébreux un peu dérangé.
- J'ai l'impression qu'on s'est pas vu depuis des années, lança Aïko, le temps passe vite.
- Plusieurs fois, j'ai essayé de t'appeler sur Skype mais t'as pas répondu.
- J'étais pas mal occupé, désolé.
- Comment vont Daïna et Enza ?
- Ça va, elles vont bien.
- J'ai su pour l'incendie, j'étais choquée.
- Pareil, je suis dégoûté.
- Et si on parlait de nous un peu ? proposa Shaylee.
Aïko soupira, il connaissait déjà la fin de cette conversation et se demandait comment il allait y parvenir sans la blesser.
- Je pense qu'on a des choses à se dire, non ? ajouta-t-elle, tu m'avais dit que la distance ne changerait rien.
- C'est ce que je pensais, je le voulais vraiment.
- Mais ?
- Tu le vois bien, ça change tout.
- Est-ce que tu t'es rapproché de quelqu'un d'autre ?
- Non, rien à voir. Je t'ai pas oublié, c'est juste que c'est difficile pour moi d'être en couple avec une fille qui est à des kilomètres et que je vois jamais. Tu comprends ?
- Tu penses qu'on peut faire quelque chose pour arranger ça ?
- On n'est pas prêt de vivre de nouveau dans la même ville, répondit Aïko, donc.. Honnêtement, je pense qu'on devrait arrêter tous les deux.
Shaylee s'en doutait, bien évidemment, mais de l'entendre de vive voix l'affectait plus qu'elle ne le pensait.
- Shaylee.. Je suis désolé. Ça me fait de la peine aussi.
- Ça va aller ? s'inquiéta Aïko.
- T'inquiète pas, c'est comme ça, c'est la vie. Je savais que ça n'allait pas durer éternellement.
Ils restèrent là un moment, ne sachant pas quoi se dire, comme deux étrangers. L'expression "loin des yeux, loin du coeur" prenait tout son sens pour Aïko, il ne pensait pas que ça marchait avec des êtres chers mais avec un amour de jeunesse.. C'était autre chose.
- J'espère qu'on pourra rester des amis ? Je t'adore et ça me ferait chier qu'on arrête de se parler.
- Mais oui, t'en fais pas. C'est sûrement un mal pour un bien.
- Je suis content que tu le prennes comment ça.
- Je suis pas du genre à faire une crise d'hystérie. Finalement, on se sentira peut-être mieux tous les deux.
Pendant ce temps à Windenburg.
- Hey ! chuchota bruyamment Gart, pourquoi c'est moi qui dois faire le guet ?!
- Vous êtes chiants, merde ! C'est toujours moi qui me tape les trucs pourris !
- Mais boucle-la ! répondit Jenny.
- Vous pensez vraiment qu'on va trouver quoique ce soit sur Tyler dans le bureau du dirlo ? demanda Harmony.
- Bah y a forcément son dossier quelque part, répondit Jayk.
- Et alors ? Ça veut pas dire qu'il y aura quelque chose dedans.
- C'est pas grave, ça coûte rien de jeter un oeil.
- En tout cas, dit Jenny, il se fait vachement discret depuis qu'on l'a coincé chez le vieux Eurli.
- Il a quelque chose à cacher, c'est sûr. Reste à découvrir ce que c'est.
- Oh my god, lança Harmony.
- Quoi ?
- C'est dar !
- C'est quoi ??
- Je crois que je viens de découvrir un truc.
- Qu'est-ce que c'est ?
- Ils ont tous la même bague.
- Comment ça "ils ont tous la même bague" ?
- Attends.
- Allez, marmonna Gart d'impatience, magnez-vous..
- Regarde, j'ai fait des photos des suspects.
- T'as fait des photos des suspects ? Tu t'es cru dans un James Bond ?
- Bah c'est la première chose à faire.
- Regarde bien.
- Zoom.
- Le maire, le chef de la police, un gars avec eux. Ils portent tous la même bague au même doigt.
- Tu crois que ça veut dire quelque chose ?
- C'est pas une bague commune en tout cas, c'est quand même zarbi.
- Je crois pas avoir vu Tyler avec cette bague.
- J'ai rien trouvé sur Tyler, dit Jayk.
- Donc rien d'étrange ? demanda Jenny.
- Bah si justement, on a tous un dossier sauf lui.
- T'es sérieux ?
- J'ai une idée en tête mais pour être sûr on aura besoin d'Aïko, y a que lui qui peut s'infiltrer partout en informatique.
- Y a plus qu'à attendre qu'ils reviennent.
- Ouais. Venez, on bouge avant que le dirlo débarque.
- Qu'est-ce qu'il y a ? demanda Jamy.
- Rien.
- Arrête, je vois bien que t'es distante avec moi. Parle, dis quelque chose.
Enza n'avait aucune envie de tourner autour du pot, elle prenait ça comme un pansement à enlever d'un seul coup, le plus vite possible.
- Je pense qu'il faut qu'on se sépare, lança-t-elle.
- Quoi ?
- Jamy..
- Comment ça il faut qu'on se sépare ?
- Y a plus ce qu'il y avait avant, la distance nous a freiné et je pense que ce serait une erreur de continuer comme ça.
Jamy en resta bouche bée un instant.
- Et tu me dis ça comme ça ??
- J'allais pas te l'annoncer par téléphone quand même.
- Non mais on pourrait en parler avant de prendre une décision pareille.
- Jamy, ne crois pas que ça m'enchante, mais je suis réaliste. Ça marchera pas, on le sait tous les deux.
- Non, j'étais pas au courant.
- Tu m'as dit que tu sentais qu'il y avait un problème entre nous.
- Oui mais pas au point de se séparer carrément !
A la fois gênée et soulagée de cette décision, elle soupira, ne trouvant pas les mots.
- T'as rencontré quelqu'un d'autre ? s'inquiéta Jamy.
- Non, j'ai rencontré personne.
- Tu peux me le dire.
- Je sais, mais c'est pas le cas.
- J'ai pas envie qu'on se sépare, Enza, je suis bien avec toi.
- Jamy.. Je t'aime beaucoup, tu le sais.
- J'aurais aimé que tu m'aimes tout court.
- On peut pas être ensemble en étant aussi loin l'un de l'autre.
- Y a plein de gens qui vivent comme ça, y a des couples qui survivent à ça.
- Et y en a d'autres qui n'y survivent pas. On a essayé.
- C'est la première fois qu'on en parle, on pourrait au moins se laisser une seconde chance ?
- Nan, Jamy, je reviendrai pas en arrière.
- Je suis vraiment désolée mais..
- C'est bon, coupa-t-il sèchement, ça va.
- Vous regrettez pas un peu l'époque du lycée ? demanda Aïko d'un air mélancolique.
- Regretter non, répondit Enza, on a évolué et découvert d'autres choses. Mais nostalgique oui.
- Si on fait exception de l'année dernière, dis-je, tout était plus simple qu'aujourd'hui.
- L'arrivée de Valdenn a compliqué quelque peu les choses, ajouta Enza.
- Maintenant on est dans un monde peuplé d'adultes, soupira Aïko, et ils viennent nous emmerder avec leurs comportements d'adultes et leurs problèmes d'adultes. On n'avait rien demandé à personne.
- Tant qu'on sera tous les trois, répondis-je, rien ne pourra nous arriver.
*Musique : Michel Sardou - Je vole (version Louane/instrumentale)
Christophe Beck - Remembering Jenny (Buffy contre les vampires)